Plus de 30h sur un bateau pour rejoindre Maroantsetra depuis l’île Sainte-Marie
Chaton et moi avons passé une mauvaise nuit : nous ne sommes pas très sereins pour notre trajet en bateau.
Le matin, nous bouclons nos valises, en l’occurrence nos sacs à dos, et attendons que le signal soit donné pour partir. L’Allemand doit recevoir un coup de fil pour nous avertir.
A 9h, je trépigne déjà. Peut-être vaudrait-il mieux prendre les devants et appeler nous-même ? Ou mieux, nous rendre directement au port ? Chaton et l’Allemand sont confiants : au prix où on va payer, ils ne sont pas près de nous oublier !
A 10h15, urgence ! Vite ! C’est maintenant ! Le bateau va partir !
Tuk-tuk pour Chaton, Chatounette et moi ; scooter pour Pépère et Mamisa qui ont décidé de nous dire au revoir depuis le port.
Arrivés sur les lieux, c’est la consternation : le bateau est parti…
Fausse alerte : le bateau est parti, mais il revient. Il est parti faire un petit tour pour tester 2/3 petits trucs car il y a eu des ennuis mécaniques, ils ont réparé et veulent vérifier ça.
Chaton et moi prenons le scooter de Pépère et Mamisa pour aller rapidement faire quelques emplettes en ville. Le trajet devrait durer entre 10h et 14h SI la mer est bonne, et nous ne sommes pas sûrs qu’il y ait à boire et à manger à bord. On nous donne 15 minutes chrono pour revenir ! Petit coup de stress !
Temps en ville bien rentabilisé, Chaton et moi nous séparons la liste des emplettes et revenons presque simultanément au scooter. Nous roulons à fond la caisse, sauf à l’endroit où les gendarmes font le piquet.
De retour au port, nous montons à bord après des aurevoirs à Pépère et Mamisa bien noués et précipités.
Le bateau traîne à partir. Au bout d’une demi-heure, Pépère et Mamisa, qui se tenaient sur le quai pour nous voir partir, décident finalement de s’en aller. Chatounette en a les larmes qui lui coulent. Le bateau ne partira encore qu’une heure après, à 12h20. En accrochant le bateau d’à côté. On a bien failli péter une poutre en métal qui soutient le pont supérieur ainsi que le bras du marin qui a voulu repousser notre bateau pour éviter la collision.
C’est parti !
Sur le bateau, il y a de la place en plein cagnard, par contre, si on veut être à l’ombre, il ne faut pas craindre le contact charnel : c’est l’entassement, voire l’embriquement.
J’alterne avec Chatounette entre les deux camps, Chaton choisit le cagnard.
Nous voyons encore quelques baleines et assistons à un cours sur la chaîne alimentaire : des oiseaux qui mangent des poissons, qui chassent d’autres poissons.
Au bout de quatre heures de route (enfin de mer), nous doublons à peine la pointe Nord de l’île Sainte-Marie. Nous sortons notre carte de Madagascar et estimons que nous avons fait 1/5ème du trajet. Ce qui devrait nous faire arriver vers 8h le lendemain matin.
Mais ¼ d’heure après, le bateau s’arrête. Il repart, et s’arrête à nouveau, dérivant pendant un bon quart d’heure. Pendant sa dérive, le bateau a fait demi-tour.
Nous repartons enfin mais tout droit, direction Sainte-Marie !
Les gens autour de nous n’ont pas l’air affolés. Mais ce qui est sûr, c’est qu’ils n’ont pas le sens de l’orientation ! Car lorsque je leur demande « Retour Sainte-Marie ? » en montrant du bras la direction où nous allons, ils me répondent : « Non, Maroantsetra ! ». Lorsque je leur montre que Maroanstetra se trouve derrière nous, ils se regardent entre eux, hébétés.
Chaton prend des renseignements directement à la source, auprès du capitaine. En effet, nous rentrons à Sainte-Marie, problème technique : nous n’avons plus de direction, la barre tourne dans le vide. Ça va être chouette pour rentrer au port !
A 21h, nous sommes de retour à la case départ. Certains passagers repartent, les pousse-pousses sont là pour nous conduire à l’hôtel mais nous sommes indécis. En effet, le bateau repart quand les réparations sont terminées mais nous ne pourrons pas être prévenus. Et il semblerait qu’il y en ait pour 3 heures seulement.
Nous nous décidons à rester dormir sur le bateau. Chaton a repéré un endroit où il y a de la mousse, à l’avant du bateau. Et de toute façon, il n’y a plus de place à l’intérieur et le sol est dur et crade.
A minuit, il se met à pleuvoir… C’est bien notre veine ! Je sors rapidement la grande bâche en polyane que j’avais emmenée. Sous nous, c’est également de la bâche. Il faut s’organiser pour que l’eau s’écoule sans nous tremper ni nos sacs. Et réussir à respirer. Je ne trouve pas mieux que garder la main en l’air pour maintenir la bâche au-dessus de nos têtes. La nuit va être longue…
A 3 heures du matin, nous reprenons le large. Il pleut par intermittence, comme mon sommeil.
A 8 heures, le capitaine estime qu’il est temps de nous lever et klaxonne de sa corne de brume. Nous sursautons presque, sortons de notre bâche, et découvrons les marins hilares de nous voir ainsi émerger.
Le trajet est long à en mourir ! Plus de baleines, de distractions par des poissons ou des oiseaux. Il fait à nouveau une chaleur torride. La seule ombre se trouve dans le bruit, l’odeur et l’entassement humain. Nous sommes impressionnés par l’inactivité des malgaches. Plus de 24h sur ce caboteur, et ils sont toujours couchés, sans broncher, sans bouger.
Petit passage houleux où Chatounette et moi avons l’estomac retourné mais ça passe.
Peu avant la nuit, nous arrivons enfin. Enfin presque ! Nous mouillons près de Nosy Mangabe, une île protégée à la forêt primaire et aux nombreuses espèces de lémuriens et d’oiseaux. Nous attendons là un autre bateau qui doit ramener les passagers sur la terre ferme car notre bateau de marchandise ne rentrera que le lendemain matin au port.
Pendant cette attente, une dame me passe son téléphone pour que je parle à sa sœur qui a un logement à Maroantsetra. Il s’agit de l’hôtel Hippocampe. Il est signalé dans mes guides mais hors budget. Finalement, la dame me le propose à un prix dérisoire ! Espérons que nous nous soyons bien compris !
Elle vient nous chercher directement à notre bateau. Nous montons à bord du sien, avec les deux autres vazas du cargot, des Israëliens. La vitesse nous grise ! Après plus de 30 heures sur un bateau au ralenti, cela fait un bien fou de tracer à fond la caisse. Il fait nuit, mais les malgaches ont une très bonne vision nocturne. Du moins je me rassure avec cet argument car personnellement, je n’ai vu qu’à la dernière seconde le bateau qui venait face à nous et que nous avons frôlé.
Il fait nuit mais le clair de lune et les étoiles laissent deviner un endroit magnifique avec plusieurs îlots et de la mangrove.
Nous débarquons. Cette fois nous poursuivons notre périple à l’arrière d’un pick-up. La piste est défoncée. Nous ne parcourons qu’à peine 3km mais en 20 minutes.
Arrivés sur les lieux, nous sommes accueillis comme des princes. Boissons offertes pour commencer. Derrière nous, une piscine à filtre écologique (un bassin avec des plantes, un autre avec des poissons…). Le décor est sublime. Nous avons hâte de le découvrir en plein jour.
Nous découvrons nos chambres. Au top ! Une vraie chambre d’hôtel à l’occidental !
Le repas est commandé, la douche est chaude, les serviettes et peignoirs sentent bon, le wifi fonctionne… Le trajet en bateau est déjà oublié !
Très bon repas, rhum arrangé offert, et vite au lit !
Pratique :
Transport : Sainte-Marie – Maroantsetra, en bateau de marchandise, circule 1 fois par semaine, entre 10 et 14h de trajet si la mer est bonne et selon la marée, 30h de trajet pour nous car problème mécanique, repas à bord (riz+légumes), entre 60000 A et 100000 A par personne. Enfant : gratuit ou 20000 A.