Le Kawah Ijen
2 journées en une puisque nous avons fait une nuit blanche.
1er réveil à 5h du matin : moi qui ai le sommeil super lourd (on pourrait faire du marteau-piqueur à 5m de moi que je ne me réveillerais pas), cette musique balinaise m’a réveillée ! Mais quel volume sonore aussi ! Enfin, surtout selon d’où venait le vent.
Une idée bizarre me vient : et si j’allais voir ce qu’il se passait. Pensant que tout un orchestre est en train de défiler dans la rue voisine, j’enfile les premiers vêtements qui me tombent sous la main et sors.
Je n’ai pas pris de lampe frontale, et avance à tâtons dans la nuit noire, me dirigeant au bruit. Au fur et à mesure que j’avance, je me rends compte que ce n’est pas si proche. Mais maintenant que je suis debout, je ne vais pas faire marche arrière.
Je traverse la route principale et continue mon chemin dans une ruelle de terre, tout juste éclairée par les lumières des habitations. Je suis étonnée au passage du nombre de gens debout à cette heure-ci. Ils sont tous en train de balayer leur cour. Bizarre.
Je marche ainsi pendant près d’un quart d’heure / vingt minutes lorsque le son atteint son maximum. Si j’avais eu des boules Quiès, je les aurai mises. Le son ne provient pas d’un orchestre mais d’une enceinte ressemblant d’ailleurs plutôt à un haut-parleur.
J’entre dans la cour, des gens me dévisagent, interrogateurs. Je l’étais déjà moi-même.
La conversation s’entame. Ces personnes préparent une cérémonie pour un mort. Il y a une sorte d’autel remplis d’offrandes dont 3 cochons grillés. A côté, pleins d’instruments de musique. La fille du défunt m’explique qu’un orchestre va bientôt arriver. Ils défileront tous vers 9/10h pour la crémation du corps qui aura lieu sur la mer. Je discute encore 5 minutes puis retourne me coucher.
Deuxième réveil à une heure plus en relation avec nos habitudes. Notre petit-déjeuner arrive à notre terrasse vers 9h.
En discutant avec la dame de l’hôtel, on lui dit que l’on compte faire le Kawah Ijen. Ni une, ni deux, elle nous trouve un organisateur. Il parle un peu français, et rigole à la Henri Salvador. Après une longue négociation qui ne fait pas franchement baisser le prix, on accepte quand même le deal.
Le prix reste peu élevé comparé à toutes les complications que cela demanderait si on le faisait pas soi-même, c’est-à-dire sans passer par un intermédiaire : trouver les tickets pour le ferry et le lieu, louer un 4×4, trouver le bureau de vente des tickets pour le parc du volcan…. Nous nous en tirons pour 25€ par personne comprenant le rapatriement de notre voiture pour que celle avec tous les sacs ne reste pas sur le port, la traversée en Ferry pour Java, la location de 4×4 ainsi que 2 chauffeurs, l’entrée du parc, un guide, l’eau, et surtout, LE club sandwich.
Le club sandwich était l’argument de vente number one de notre interlocuteur. On pouvait voir ses yeux saliver quand il en parlait. Ça valait pour lui tout l’or du monde. On conclut donc l’affaire, non pas pour le sandwich mais plus par fainéantise. Notre interlocuteur viendra nous chercher à 23h.
On gagne donc une journée, on profite de la plage de Pemuteran. On s’octroie même une petite balade jusqu’au petit village de pêcheurs.
Nous marchons jusqu’au bout de la petite péninsule, mais toujours près de l’eau, car le sable est bouillant, impossible de marcher dessus même avec nos tongs. Je croiserai au passage mes amis nocturnes en pleine cérémonie sur la plage. Ils sont en costumes de circonstances, mais cette fois, je n’irai pas les déranger.
L’heure du repas approche. Le petit restaurant où l’on s’arrête est bon, mais les quantités minuscules. En fait, ils ont tout misé sur la déco de l’assiette, à l’aide de feuilles de bananiers. C’est original et même très joli, mais ça ne nourrit pas son homme !
De retour à notre petite plage de prédilection, Chaton et moi installons les hamacs pour se faire une sieste (de récupération pour moi) d’anticipation pour la nuit blanche qui nous attend.
Chatounette dormira une demi-heure, Chaton et moi, rien du tout. Impossible de trouver le sommeil alors que nous étions très bien installés, entre 2 arbres plantés dans le sable, face à la mer.
On se résigne et rejoignons le reste du groupe se prélassant ou jouant au tarot africain sur les transats de la piscine de la resort de la veille. On y restera jusqu’à l’heure du dîner, que nous prendrons une fois de plus au même restaurant, avec la même commande (du chicken kebab bacon).
23h arrive et notre interlocuteur aussi. Mamisa est prise de diarrhées depuis une demi-heure et décide finalement de ne pas faire l’ascension avec nous. Elle nous propose de garder Chatounette. Chaton est pour, moi pas du tout. Toute la journée, j’ai parlé des flammes bleues du volcan à Chatounette, et l’ascension du dernier volcan s’était très bien passée. J’impose ma décision et nous partons pour Gilimanuk où nous attend notre Ferry et notre guide. Notre interlocuteur ramène chez lui la voiture remplie de nos sacs, et nous dit à demain vers 11h, même endroit, et avec Mamisa.
Chatounette a dormi tout le temps du trajet en voiture, et continue de dormir sur le ferry. La traversée aura duré un peu moins d’une heure. De l’autre côté, sur l’île de Java à Ketapang, nos 2 chauffeurs sont là avec leur 4×4.
Encore 2h de voiture et nous arrivons au pied du volcan. Chatounette n’a rien vu non plus du trajet et moi pas grand-chose car je m’étais cachée sous mon foulard pour m’épargner un minimum des odeurs insupportables d’échappement de nos véhicules.
Arrivés au pied du volcan, un froid terrible accompagné de vent. On s’habille de tous les vêtements que nous avions apportés puis tentons de réveiller Chatounette.
Réveil impossible… Elle pleure, râle, se laisse tomber telle une poupée de chiffon. Chaton est furax de s’être laissé influencer par moi, mais le mal est fait. Nous nous relayons donc à 3 (Pépère, Chaton et moi) pour la porter pendant toute la durée de l’ascension. Je risque d’avoir des courbatures !
Il fait nuit noire et nous marchons à la lueur de nos lampes frontales. Je trouve la montée bien raide.
Au 2/3 du trajet, on s’arrête à « la pesée ». C’est l’endroit où les travailleurs de la soufrière viennent faire peser leurs paniers et connaître ainsi le montant de leur gain.
Il y a un panier rempli de souffre (en réalité 2 paniers reliés par un manche en bois) de 70 kg (le poids moyen, mais certains portent jusqu’à 90 kg) pour que les touristes puissent se représenter la lourdeur de la tâche. Personnellement, je pourrai faire quelques mètres avec (2 ou 3), mais pas plus ! La vache ce que c’est lourd !!!
On continue l’ascension, avec toujours Chatounette sur notre dos. Arrivés au sommet du cratère, les fameuses flammes bleues dans le fond du cratère. Notre guide nous dit que Chatounette ne pourra pas descendre en son centre, 1km plus bas. Nous n’y comptions pas ! Il nous propose de la garder le temps que nous allions voir les flammes bleues. Elle dormait sur notre dos, désormais elle dort dans une cavité du volcan.
Nous commençons à descendre, mais à peine au ¼ du trajet, je décide de faire demi-tour pour rester avec Chatounette. J’ai peur qu’elle se réveille en pleurs avec cet inconnu et qu’elle ait froid.
De plus, les porteurs de souffre sont là et d’un coup je me sens mal. Nous sommes là, touristes, à les regarder bosser, les photographier, mais surtout les gêner, dans tous les sens du terme. Je me sens mal à l’aise, pas à ma place. Quelle misère ! Ils cavalent avec leurs paniers chargés de souffre, les mieux chaussés ont des bottes en caoutchouc, les autres des tongs ou des baskets toutes déchiquetées, les dents ravagées, à essayer de zigzaguer parmi la horde de touriste.
J’en vois un qui remonte le cratère les paniers bien garnis et lui propose mon aide, puisque je remonte également. J’attrape une pierre et remonte jusqu’à Chatounette. J’attends le porteur là-haut, avec ma pierre.
Chatounette dort paisiblement, abritée du vent par notre guide. Mon porteur arrive et je lui rends sa pierre. Je lui propose un cigarillos à la vanille et il prend le temps de le fumer. On discute un peu, surtout avec les mains. D’après lui, je viens de porter une pierre de 10kg (il écrivit 10 dans la poussière), puis, en la reprenant, il efface son 0 pour mettre un 5 à la place. Je pense qu’il a voulu me flatter mais je dois reconnaître que j’en ai chié à me trimballer cette pierre, pourtant sur une très courte distance comparée à celle qu’il doit parcourir lui.
Il est temps pour lui de reprendre son travail mais avant de partir il me demande de l’argent. Je lui en donne et l’homme repart. Que penser ? Est-ce du voyeurisme ? Qu’est-ce que je fais ici ? Et maintenant que j’y suis, qu’est-ce que je peux y faire ?
Pendant que je broie du noir, Chaton revient du centre du cratère. Il me dit « vas-y, ça vaut vraiment le coup ». Là, je me rappelle que je suis tout de même venue voir le Kawah Ijen, ce magnifique volcan de souffre. Je fonce à toute allure vers le bas.
C’est un spectacle magnifique : les flammes bleues, la fumée qui sort, le souffre qui coule, orange, puis devient jaune pétant en refroidissant…
J’observe les mineurs bosser dans le nerf du cratère et me dit qu’on n’est/naît vraiment pas tous égaux. Ils se flinguent littéralement la santé.
Au fur et à mesure que le soleil se lève, les flammes disparaissent et la lumière du jour fait apparaitre le fameux lac vert. Grandiose !
Je remonte au sommet du cratère où le reste de la troupe m’attend, gelée. Nous avons tous ce sentiment partagé de beauté et de misère. Ce qui est sûr, c’est que nous avons tous été marqués.
On ressort Chatounette de son trou, Chaton la charge sur son dos sans qu’elle ne se réveille et file ainsi sans s’arrêter jusqu’en bas. Je ferai juste une petite halte à la pesée où « mon » porteur se trouve.
66 kg de souffre sur l’épaule, et il a 50 ans. Respect !
Arrivés au niveau des 4×4, Jérémy filera ses baskets Salomon High-Tech à un porteur, et finira la journée pieds nus.
Notre guide nous propose une halte dans les plantations de café ainsi qu’une dégustation avant de retourner au port. Seuls Pépère et Chaton iront, les autres restent à dormir dans les voitures. J’ouvrirai quelques fois les yeux pour contempler les paysages mais je suis trop rincée.
Arrivés au port, vers 10h, Chatounette se réveille enfin. Il était temps ! Elle n’aura rien vu du volcan mais nous dira tout de même qu’elle a « dormi dans un trou ».
On fait la traversée en sens inverse en bateau et nous retrouvons Mamisa accompagnée de notre interlocuteur. Elle va beaucoup mieux mais n’a pas passé une bonne nuit.
On récupère nos véhicules, et filons en directions de notre étape suivante : Medewi, un spot de surf.
Arrivés sur place, les hôtels sont franchement miteux, et, en discutant, on nous indique qu’à une ½ heure d’ici, le spot de surf est beaucoup mieux (que du sable, pas de rochers) et qu’il y a plus d’hôtels.
On mange vite fait à Medewi, et reprenons la route, pour Balian Beach cette fois.
Là nous tombons sur « une maison bleue adossée à la rizière », à deux pas de la mer. Une maison d’artiste. Un peu peace and love. 2 chambres à l’étage, 1 au rez-de-chaussé plus un lit suspendu dans le salon, des toits ouverts, une déco originale faite de récup’, de la couleur, du bois, 2 salles de bain, une cuisine. Je m’attendais à un prix de folie mais pas du tout ! C’est même le plus bas prix que nous ayons à payer !
On défait les valises et nous installons. Nous y resterons 2 nuits à priori.
Margot, Pauline et Mamisa partent faire les courses, Manu une sieste, Pépère et Chatounette un petit tour dans les environs, Jérémy un plouf dans la mer.
Douche, apéro, repas, et tous au lit !
Plus d’une heure pour écrire ces 2 journée en 1 (le temps de tout remettre dans l’ordre et d’écrire), je suis « cuite », pour reprendre l’expression favorite de Chatounette ces derniers temps, depuis qu’elle a entendu Mamisa le dire pendant l’ascension du Mont Batur. J’espère que je vais bien dormir.
PS : le fameux club sandwich valait vraiment le coup !