Makassar: Paotere le vieux port et Ramang-Ramang
Nous voulions être au vieux port de Makassar, nommé Paotere (prononcez Paotré en roulant le « r »), qui fait office de marché aux poissons, de très bonne heure car l’homme au scooter nous avait dit qu’à partir de 9 heures, il n’y avait déjà presque plus de poissons.
J’avais donc mis le réveil à 6h30. Mais lorsqu’il a sonné, je l’ai direct envoyé bouler. Résultat des courses, nous sommes au port à 11 heures passées… Et effectivement, il ne reste presque plus rien, hormis l’odeur.
Nous poursuivons donc notre route : Leang-Leang ou Ramang-Ramang selon où le vent nous portera.
Une fois de plus, la route est ultra encombrée, et défoncée par-dessus le marché. Et la chaleur est toujours autant écrasante. Franchement pas une partie de plaisir.
Au bout d’une bonne heure de route, je consulte mon GPS et constate que nous avons dépassé Leang-Leang. Nous irons donc à Ramang-Ramang, situé un peu plus loin.
Peu avant le village, un rassemblement. Essentiellement des hommes. Nous nous en approchons. Et là, on croit rêver ! Ils s’apprêtent à déplacer une maison ! Elle est sur pilotis, et ils y ont accroché une structure en bambou pour pouvoir la porter à plusieurs. On croît halluciner.
Nous descendons de notre scooter pour les regarder faire. Chaton se joint à eux pour les aider. Et bien lui en a pris, car premièrement nous nous voyons offrir une boisson en remerciement. Personnellement, j’avais flairé l’arnaque, j’ai donc décliné le verre : un truc rose avec pleins de morceaux de gelée de couleurs différentes, au goût indéfinissable si ce n’est chimique au possible. Chaton m’empresse de partir pour pouvoir aller jeter cette horreur quelque part sans froisser personne.
Le deuxièmement arrive. En effet, après nous avoir indiqué le chemin pour Ramang-Ramang, un jeune nous rejoint en scooter. Il veut nous emmener quelque part. Il nous fait signe de nous garer ici, au bord de la route et au milieu de nulle part.
Il fallait la voir la pancarte qui signale l’entrée de ce qui nous attend. Il nous faut traverser une rizière détrempée. Nous sommes hésitants, c’est « gadouilleux ». Aller, on se motive, on n’est quand même pas des chochottes.
Face à nous, un ensemble de roches. Et un trou au milieu de ces cailloux. C’est notre porte d’entrée. Une porte d’entrée pour un labyrinthe à travers des parois rocheuses. C’est magnifique ! Au pied de ces rochers, de l’eau. A un moment donné, notre guide nous fait signe de retirer nos chaussures et de les laisser là, car nous allons continuer la progression dans l’eau. Nous nous exécutons mais sommes quand même bien réticents. L’eau est marron. On se regarde. A priori, nous aurons de l’eau jusqu’aux genoux. Bon ba, maintenant qu’on y est, continuons gaiement !
Le premier pied posé au fond de l’eau n’est pas réconfortant : un truc genre glaise, vase, boue… où on s’enfonce jusqu’à la cheville. Berk ! Deuxième pied. Ça colle un peu beaucoup! Chatounette, elle, a gardé ses chaussures, on regrette de ne pas en avoir fait autant ! Une fois accoutumés à cette texture, nous apprécions enfin le décor.
C’est vraiment grandiose. Un dédale de rochers, créant parfois des tunnels. Et c’est justement dans l’un de ces tunnels que Chatounette s’écrie : « j’ai perdu ma chaussure ! ». Il fait noir, et on s’imagine bien que si elle a perdu sa chaussure, c’est que celle-ci est restée collée au fond de la vase. Qui s’aventure le premier de la main ? Chaton? Moi ? Finalement, nous y allons tous les deux à tâtons, mais avec le pied ! Nous sondons, sondons et sondons encore, mais toujours pas de chaussure ! J’ai subitement un éclair de génie : ses chaussures flottent, elle a peut-être fini par rejaillir à la surface ! Et c’est effectivement le cas ! Ouf ! Chatounette continuera donc pieds nus, nous tiendrons ses chaussures à la main.
Notre labyrinthe débouche sur un petit cirque avec en son centre un lac. Whaow ! Classe ! Notre guide nous fait grimper dans les roches pour nous assoir sous un renfoncement et admirer le cadre qui s’offre à nous. L’endroit est vraiment joli et original.
Petit détail que j’ai oublié : les roches sont ultra coupantes et nous sommes pieds nus. Cela amuse beaucoup notre guide de nous entendre pousser des petits cris à chaque pas en nous tortillant dans tous les sens. Nous, beaucoup moins.
Nous redescendons de notre perchoir et poursuivons de l’autre côté du lac, toujours en chancelant. Encore quelques passages étroits dans les roches, dans la végétation puis le paysage s’ouvre pour retrouver les plaines, leurs rizières et quelques habitations.
Notre guide nous demande à Chatounette et moi de patienter ici pendant que lui et Chaton vont récupérer les scooters et les chaussures.
En attendant, Chatounette court après des chèvres et s’amuse avec des cailloux.
Lorsque Chaton revient, il est seul. Où est passé notre guide ? Il s’est sauvé, il a dû rentrer chez lui. Je demande à Chaton s’il lui a lâché un petit billet pour le remercier mais il me répond qu’il n’a même pas eu le temps. Le type s’est évanoui en un rien de temps. Étrange ! C’est toujours très surprenant cette gentillesse chez les Indonésiens! Je l’aurai bien remercié également!
Il a néanmoins pris le temps d’expliquer à Chaton la route à poursuivre. Nous nous y engageons. Au bout, un port de fortune avec deux petites embarcations. Un homme rôde dans les parages. Je lui demande le chemin à prendre pour nous rendre à Ramang-Ramang et celui-ci m’indique son bateau. Il semblerait que cela soit le seul moyen d’accès. Après négociation, nous embarquons.
Il y en a pour vingt minutes de trajet pour nous rendre au site, mais nous aurions fait demi-tour au bout de dix-neuf minutes que nous aurions été déjà comblés : la balade fut mémorable ! Un décor atypique que nous n’avions encore jamais vu. Une mangrove où les palmiers ont remplacé les palétuviers habituels sur fond de falaises karstiques, ainsi que quelques maisons en bois et embarcations pour égayer le tout. Suivi d’un passage entre les roches, créant presque un tunnel par endroit. Superbe !
Nous accostons sur un petit ponton de bois. Nous voilà enfin sur le site nommé Ramang-Ramang. Il s’agit en fait d’une plaine cernée par les falaises, habitée par une poignée d’individus. L’écho y est mémorable par endroit. Des rizières, des canards, des vaches, des parois karstiques, des maisons sur pilotis, des rochers sortant de terre… Ici, ni voiture, ni scooter, il n’y aurait aucun moyen de les acheminer là. Une vie rurale à l’ancienne où le temps semble s’être arrêté.
Nous nous promenons entre les rizières, jusqu’à ce qu’un orage éclate, déversant sa pluie tonitruante. Heureusement, un abri à proximité. Nous investissons l’endroit, craignant de devoir y passer la nuit. Les nuages semblent être bien installés. Ce qui nous fait nous rendre compte que nous n’avons ni pull, ni ciré. On a également une petite pensée pour notre conducteur de bateau qui doit trouver le temps bien long : pas loin d’une heure de balade et maintenant une demi-heure d’attente ici.
Puis, surgissant de nulle part, une dame nous rejoint pour nous proposer du café. Elle nous fournit même des oreillers qui étaient planqués dans le toit. Chaton n’aura pas le temps de le finir que la pluie cesse, laissant même la place à un ciel bleu. On n’y croyait pas du tout !
Nous nous remettons en chemin, et la dame nous invite à venir visiter une grotte. Enfin, nous « invite », il faut payer en réalité. Soit, allons-y ! Nous nous approchons des falaises encerclant la plaine, crapahutons sur des marches de terre détrempées et glissantes, et parvenons à l’entrée d’une cavité. A l’intérieur, une échelle en bambou. J’allume la torche de mon téléphone portable pour sonder l’endroit. Cela ne va pas être évident pour Chatounette. J’observe la dame faire. En haut de l’échelle, un trou de souris où il faut se faxer pour accéder à une anfractuosité, en s’aidant de cordes. Je suis la dame. Ok, Chatounette devrait y arriver, aidée de Chaton en bas et de moi en haut. Ils nous rejoignent tous les deux.
La cavité est toute petite mais il y a tout de même quelques belles concrétions. Dont une qui semble être vénérée. La dame m’a dit son petit nom, mais je l’ai oublié.
Chaton me demande ensuite de regarder le plafond. Je pensais en avoir fait le tour, mais je ne sais pas comment j’ai pu rater ça : une araignée ! Mais énorme ! La plus grosse que nous n’ayons jamais vu tous les deux. Chaton me dit : « comme celle du Seigneur des Anneaux ! ». La comparaison ne me parle pas du tout, j’ai tenté plusieurs fois de voir le premier film jusqu’au bout, je n’y suis jamais parvenue. Il y a moyen qu’elle me fasse faire des cauchemars cette araignée. Désormais, j’arriverai peut-être enfin à relativiser en voyant une faucheuse en France…
Cette cavité débouchait un peu plus loin, mais d’après la dame, le trou est trop petit pour nous. Je ne sais pas comment nous devons le prendre….
Nous retournons doucement où le bateau nous avait déposé, ayant grandi de cinq bon centimètres, de par l’épaisseur de gadoue qui s’est fixée sous nos semelles. Chatounette peine à lever ses pieds par tant de poids supplémentaire.
Arrivés au ponton, je nettoie ses chaussures dans la rivière, et l’une d’elles me glisse des mains. Avec le poids de la boue, elle file directement au fond de l’eau. Décidément ! C’est plus profond que dans notre dédale de roche précédant, Chaton sonde donc avec une rame. Je m’apprêtais à faire une croix dessus lorsqu’un homme l’aperçoit ! Elle avait rejailli un peu plus loin. Sacrées chaussures !
Nous remontons à bord, et le trajet retour est encore plus beau grâce à la lumière du soleil couchant.
Arrivés à notre point de départ, notre chauffeur retrouve sa famille. Nous leur demandons de poser avec nous, ils ont l’air bien sympathique et nous trouvons que notre chauffeur a vraiment « une gueule », même si elle est à peine plus haute que celle de Chatounette. Nous leur demandons ensuite leur adresse, décidés de leur envoyer la photo par la Poste lors de notre retour en France. Premier obstacle, ils n’ont pas l’air de savoir écrire. Deuxième obstacle, et pas des moindres, ils n’ont pas d’adresse. Eh bien non, ils n’ont jamais reçu le moindre courrier de leur vie! On ne vit vraiment pas dans le même monde !
Nous retournons à notre scooter et enfilons nos casques, trempés par l’orage. Un régal ! Nous voulions rentrer directement à Makassar sans nous arrêter, mais au bout d’une heure dix de trajet, nos fesses ont pleuré au supplice. Il ne restait pourtant que quinze minutes de route, mais nous n’en pouvions plus, le boule en confiture.
Nous dînons à un restaurant chinois près de notre hôtel puis rentrons chez nous, contents de pouvoir nous délivrer de toute cette boue qui nous collait à la peau, aux chaussures, aux vêtements… Une bonne douche chaude, et au lit !
Mais pour ma part, je file sur le toit de notre hôtel pour rédiger le blog, la connexion y semblant meilleure. Lorsque je retourne à la chambre, vers minuit, Chatounette ne dort pas : elle n’a pas arrêté de vomir ! Elle a la forme, mais quelque chose n’a pas dû passer. A moins que ce ne soit ma présence qui lui manquait car cinq minutes après mon arrivée, elle sombre dans le sommeil.
Pratique :
Ramong-Ramong : 1h30 de route depuis le centre de Makassar, après Maros (demander sa route depuis cette ville). 250.000 Rs le bateau pour s’y rendre, négocié 150.000 Rs. 5.000 Rs par personne l’entrée sur le site. 50.000 Rs pour visiter une grotte (il y en a trois), négocié 40.000 Rs.
Pour se rendre au dédale dans les roches : avant l’embarcadère, tourner à gauche. Un peu plus loin (1km ?), une route bitumée part en équerre sur la droite. La prendre, et s’arrêter au virage à 90° sur la gauche. Traverser en direction des roches qui se trouvent sur la droite. L’entrée se trouve près d’un encart vert (voir la photo).
Location de scooter : 100.000 Rs par jour.
Hôtel Agung à Makassar : chambres à partir de 225.000 Rs petit-déjeuner inclus, eau chaude, télé, wifi, climatisation, impeccable.